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Extraits de quelques oeuvres

La Philosophie est-elle inutile ?

 Philosophie et souci de la valeur
 Notre rapport au temps est lié à nos projets
 Affairisme et corruption
 La pensée descriptive

LA PHILOSOPHIE ET LE SOUCI DE LA VALEUR ( P.24- 25 )

" Le discrédit qui frappe la philosophie aujourd'hui semble plutôt lié à une espèce de grande mutation de la culture mondiale qui s'opère sous le regard de tout le monde et à une vitesse telle que les consciences philosophiques de la planète ne peuvent qu'accuser un grand retard dans leur tentative, si tentative il y a, de penser la mutation en question. Je vais revenir sur cet aspect des choses dans un instant. Mais auparavant, et pour davantage mettre en relief ce qui demeure attendu de la philosophie dans le contexte mondial d'aujourd'hui, je voudrais rappeler l'inaptitude des sciences émancipées et plus particulièrement des sciences de la nature, à envisager leurs propres résultats sous un rapport autre que celui de leur utilisation, de leur opérativité, de leur production sur une plus ou moins grande échelle, bref, de leur commercialisation. On nous dit, et nous lisons parfois çà et là que les savants eux-mêmes ressentent le besoin d'élaborer une philosophie de leur discipline, de réfléchir, non seulement à ce qu'ils font, mais également aux conditions et aux postulats de leur acte autant qu'à ses mécanismes. On ajoute que le savant ne pensait ce qu'il faisait que pour le faire et qu'à présent, il se met à penser ce qui fonde et motive cette pensée elle-même. Voilà qui est intéressant et qui montre que la mission du philosophe et de la philosophie est insupprimable !Peu importe que ce soit le savant lui-même qui se transforme en philosophe ou que ce soit le philosophe qui se penche sur l'activité du savant. Ce qui apparaît important ici c'est que le souci de la finalité, de la valeur et du fondement de cette activité de l'homme continue de préoccuper les hommes. "

La Philosophie est-elle inutile ?
Editions CLE, Yaoundé, 2003
p. 24-25

 

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SNOTRE RAPPORT AU TEMPS EST LIE A NOS PROJETS ( pp.53-54-55 )

" Le temps, c'est nous qui le créons……Voici une salle de classe dans laquelle nous nous trouvons. Si on demande à deux garçons de balayer le sol de cette salle, deux cas de figures possibles peuvent se présenter. Le premier garçon peut décider de faire du grand balayage. Il procède mètre carré par mètre carré. Le seau d'eau, la serpillière et le produit lustrant sont à sa portée. Il avance méthodiquement et contemple son œuvre à chaque fin d'étape intermédiaire. Il nettoie la salle de classe comme s'il participait à un concours devant récompenser le meilleur nettoyage d'une salle de classe dans la ville ! Cela peut lui demander deux, voire trois heures de temps ! Il aura créé un temps lié à un projet qu'il est seul à avoir conçu dans toute sa clarté. Le temps d'une volonté d'excellence, pourquoi pas, dans l'art de balayer le sol d'une salle de classe. Le temps d'une volonté d'excellence qui aura nécessité qu'il aille puiser dans ses qualités personnelles de persévérance, de patience et d'endurance, la ressource d'énergie devant lui permettre d'atteindre son but. A côté, son camarade, lui, aura vite fait d'expédier cette tâche en cinq minutes, se contentant d'une propreté minimale, ne cherchant aucunement à battre à un record quelconque, ne visant aucune récompense particulière de ses maîtres, pressé plutôt de se libérer pour aller terminer la lecture, commencée la veille, d'un roman qui le passionne. On voit comment lui aussi peut être dit avoir créé un temps supplémentaire. En effet, il prend sur le nettoyage de la salle de classe le temps de terminer la lecture de son roman. Peu importe pour lui que la salle de classe ne soit pas bien nettoyée ! Son projet est ailleurs.

Au commencement il y a donc nécessairement un projet de l'homme. Et ce projet conditionne notre relation au temps. Ce que j'appelle projet ici peut être plus ou moins simple, plus ou moins complexe. L'exemple que je viens de citer concernant le nettoyage d'une salle de classe illustre un projet simple. Mais l'organisation de la production économique à l'échelle de toute une société est également un projet de l'homme, un projet plutôt complexe. Par conséquent, il est tout à fait incorrect de juger ou d'apprécier les produits d'un projet par référence, non pas à ce même projet mais à un tout autre projet. "

La Philosophie est-elle inutile ?
Editions CLE, Yaoundé, 2003
pp.53-54-55

 

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MENTALITE DE JOUISSEURS , AFFAIRISME ET CORRUPTION (p.63-64)

" Sans se risquer à avancer un pourcentage quelconque, on peut néanmoins affirmer que la fièvre de l'enrichissement et de la réussite à la mode occidentale a gagné tout le monde en Afrique ( y compris les hommes de la campagne envahis eux aussi par le transistor et la télévision ). Mais si la faillite de l'Afrique s'exprime le plus clairement quelque part, c'est essentiellement chez les élites qui peuplent les villes, symboles de la modernité avec tous ses dérivés. Elites fonctionnaires des Fonctions Publiques pléthoriques et vaches à lait, élites auxquelles très souvent leurs études ou simplement leurs missions et promenades en Europe et aux Etats-Unis ont donné le goût oppressant du luxe et du lucre, de l'enrichissement rapide et forcément de l'enrichissement facile. Comment pourrait-on attendre de ces élites que par une sorte de " masochisme ", elles se soumettent à une discipline de travail et adoptent un culte de l'effort que les alléchantes propositions des hommes d'affaires des sociétés de consommation, tentant de replacer du vieux matériel " retapé " ou des déchets toxiques contrarient chaque jour ? Si les banques se font jeter par terre et que les entreprises ferment par manque de véritables entrepreneurs, ces pièces maîtresses de l'économie libérale, n'est-ce pas parce que le temps manque à ceux qui auraient eu besoin de bien assimiler les ressorts cachés de cette culture importée à défaut de la forger eux-mêmes au travers d'une longue et patiente praxis de tous les jours ? Au lieu de cela nous assistons à une excitation effrénée de la " goinfrerie " de jouissance de la civilisation des " affaires " telle que plus personne en Afrique, parmi les élites- fonctionnaires tout comme chez les jeunes entrepreneurs et autres hommes d'affaires, ne sait attendre progresser normalement dans sa carrière. On veut brûler les étapes et paraître immédiatement au sommet de l'échelle et de la réussite. Conditionnée à consommer les produits des pays industrialisés et détournée de la voie qui aurait pu conduire à un développement endogène, l'Afrique se comporte comme si elle n'avait plus rien à inventer. Tout aurait déjà été créé pour elle et il ne s'agirait plus que de s'installer dans son fauteuil de jouisseur. On ne travaille pas, on " bouffe " ; on ne gère pas, on prend sa part de gâteau national ; on n'administre pas pour l'intérêt général , on place ses frères de tribus et des parents pour qu'à leur tour ils appliquent " la politique du ventre ".

Tous ces comportements peuvent paraître méprisables (et ils le sont) en tant qu'ils traduisent une trop grande fixation sur les instincts les plus bas de l'homme, ceux qui ne le distinguent pas beaucoup des autres animaux ".

La philosophie est-elle inutile ?
Edition CLE, Yaoundé, 2003
pp.63 -64

 

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LA PENSEE DESCRIPTIVE (p.99-100 )

" Je ne pense pas me tromper si j'affirme que d'une manière générale et massive, notre Afrique noire en est encore à magnifier la pensée descriptive. Au plan culturel nous continuons à exhiber aux yeux de l'étranger et du touriste ce que nous appelons nos traditions et nos valeurs ancestrales. Cette présentation- exhibition elle-même ne se limite qu'aux danses folkloriques. Il est normal que nous cherchions à valoriser notre patrimoine culturel et touristique ; mais cette opération ne devrait pas se limiter à ce que j'ai appelé tout au long de cet exposé la pensée descriptive. Car, à bien y regarder, on se rend compte que ce n'est encore et toujours que de la présentation de ce qui était déjà là ; c'est l'étalage de données produites, donc crées par d'autres, les ancêtres certes, mais tout de même des personnes autres que celles qui doivent répondre aux défis des temps présents. Je dirais la même chose concernant nos richesses touristiques souvent vantées ! Elles demeurent des richesses naturelles n'ayant pas la plupart du temps accédé au statut de produits touristiques crées, aménagés par la nouvelle pensée créative en ce domaine. Tant que nous continuons à conduire les touristes visiter des sites que la nature seule offre à la contemplation de tous, nous demeurons des acteurs mus par la pensée descriptive et non par la pensée créative. Car, pour dire qu'on est passé à l'étape de la pensée créative et inventive dans ce domaine par exemple, il faudrait transformer certains naturels en véritables produits commercialisables. Beaucoup de richesses naturelles demeurent encore enfouies dans la nature et la forêt, inaccessibles et à l'état sauvage. Si je considère le secteur agricole, je dirais la même chose ; nous ne sommes pas sortis de l'étape de la pensée descriptive. Concrètement ici, cela veut dire que nous nous contentons de ce que la nature offre. Il est dit que le Cameroun possède des sols très fertiles. Mais, parfois, si ce n'est souvent, ces sols produisent ce que l'homme n'y a pas intentionnellement semé. Si je considère à présent le domaine scientifique, et notamment l'exploitation de notre pharmacopée traditionnelle, ce sera pour dire que la pensée créative n'est pas mieux exprimée ici qu'ailleurs. J'entends dire de temps en temps que dans notre Cameroun, il existe des tradi-praticiens capables de guérir des maladies réputés incurables telles le cancer et le sida. Mais quel est le niveau de leur collaboration avec les laboratoires de recherche médicale de l'I.M.P.M et de la Faculté de Médecine et des Sciences biomédicales ? Il ne faut rien se cacher. Vous le savez vous-mêmes, c'est souvent une affaire de très gros sous et nos tradi-praticiens craignent d'être purement et simplement dépossédés de leurs secrets sans contrepartie. Voilà pourquoi, au plan médical aussi, notre pays et l'ensemble de l'Afrique piétinent et demeurent réduits à consommer ce que la pensée créative des pays industrialisés de l'hémisphère Nord déverse sur nos marchés intérieurs "./

La Philosophie est-elle inutile ?
Editions CLE, Yaoundé, 2003
P ;99-100

 

 

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