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Collogue philosophique

Extraits du livre dialogue L’Etat et les clivages ethniques en Afrique 

De la limitation du nombre des partis politiques

Thierry Michalon : Je crois, cher ami, que nous sommes d’accord sur pas mal de choses, et que nous pouvons émettre à présent quelques propositions de base susceptibles de servir dans le cadre des reformes de l’Etat en Afrique.
La première serait de renoncer à la désignation au suffrage universel direct du Président de la République. Ce procédé, réputé démocratique, s’avère à l’usage terriblement anti-républicain : - il sollicite chez les citoyens ce désastreux réflexe de recherche d’un Père, d’un Chef, sur des bases qui ne sont pas « politiques » mais relèvent plutôt, comme le disent avec humour certains socialistes français, du « concours de beauté » : on vote pour la personne qui nous inspire le plus confiance par son aspect physique – « Juppé ? Il lui manque 20 kilos ! », s’exclama un jour un député RPR – et par le pouvoir de conviction  de son verbe ;
- il décrédibilise donc la notion même d’institutions, à savoir de mécanismes impersonnels, fondement de la République ;
- il suscite dans l’opinion des affrontements sur des bases peu politiques et très subjectives, car la campagne est un affrontement de personnalités plus que la présentation de programmes de gouvernement distincts ;
- il investit l’élu d’une légitimité écrasante qui lui permet de concentrer entre ses mains des pouvoirs considérables, voire – comme en Afrique – de s’ériger en dictateur.

Njoh Mouelle : Nous avons longuement discuté de cette question autour de laquelle tournait également celle de la place du chef dans la « culture républicaine » qui accorde bien plus de place aux institutions qu’à la « culture du chef. » Sommes-nous cependant sûrs que le fait de faire élire le président de la République au suffrage restreint et non plus au suffrage universel empêchera tel ou tel président doté d’une forte personnalité servie par un charisme débordant d’occuper plus de place que ne le lui permettraient les institutions ? On devrait cependant tenter l’expérience pour voir ce qu’elle pourrait donner concrètement ici ou là ! Elle devra être précédée d’une bonne campagne d’explication destinée à des populations, notamment en terre africaine, que rien n’empêcherait de continuer d’appeler leur chef d’Etat « père de la nation », qu’il soit élu ou pas au suffrage universel ; à moins que cette appellation ne soit purement et simplement transférée au premier ministre chef de l’Exécutif, s’il se trouve qu’aux yeux de tous, c’est lui qui détient l’effectivité du pouvoir !

Thierry Michalon : La seconde proposition consisterait en une limitation par la constitution du nombre des partis autorisés à se former et à solliciter les suffrages des citoyens : avec trois, quatre, ou cinq partis, la propension naturelle à la formation de partis purement ethniques ne pourrait se concrétiser, et ces partis seraient contraints à se présenter comme porteurs de programmes de gouvernement différents, ce qui est indispensable au bon fonctionnement des mécanismes démocratiques.
Le fédéralisme ethnique et la démocratie consociative auraient, vous avez raison, l’inconvénient de pousser à la cristallisation de clivages dont nous devons au contraire souhaiter l’estompement rapide, j’en conviens. Il me semble que les deux propositions ci-dessus seraient en mesure de fonder sur de meilleures bases les Etats africains. 

Njoh Mouelle : Il s’agit ici d’une idée qui me paraît fondamentale. On ne devrait pas continuer de laisser se créer des partis politiques de pure forme et pratiquant des recrutements ethniques de leurs militants. On pourrait accélérer par là la promotion de la conscience citoyenne. On n’empêchera sûrement pas que continue de s’exprimer une préférence ethnique ; mais en limitant le nombre des partis politiques à trois, quatre ou cinq, on contribuerait à encourager le rapprochement de plusieurs ethnies au niveau régional tout comme au plan national dans son ensemble.
pp.89-91

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