SUR
L'UNITE NATIONALE
Je suis l'INVITE Spécial de l'émission
ACTUALITES -HEBDO
Du dimanche 16 Mai 2004 à 19h.
Opinions émises :
SUR LES FETES DE REJOUISSANCES AU VILLAGE APRES NOMINATION A DES POSTES
DE RESPONSABILITES
Le phénomène n'a fait que s'intensifier année après
année : quand on vient de bénéficier d'une nomination à un
poste de responsabilité jugé important ( chef de service,
directeur, secrétaire général de ministère,
ministre, etc. ) on rentre dans son village organiser une grosse fête à laquelle
on invite toute la nation par le biais de la télévision
d'Etat ! le dicton répété ça et là proclame
que l'enfant du pays parti à la chasse et ayant attrapé un
gros gibier se doit de rentrer auprès des siens partager le gibier
avec eux. Deux observations viennent à l'esprit :
1°) Il est indécent d'imposer à tous les concitoyens à travers
la télévision nationale, des réjouissances tapageuses
et privées dont l'indécence éclate en ceci que les
fêtards n'ont aucune pensée pour ceux dont les villages
ou les départements n'ont peut-être jamais eu la faveur
de voir l'un des leurs nommés à l'une quelconque de ces
hautes fonctions.
2°) l'idée selon laquelle la nomination à un poste
de responsabilité est une sorte de chasse fructueuse s'inscrit
dans la logique de la politique du ventre qui fait considérer
tout poste de responsabilité comme un gisement et un gisement
privé, une part de gâteau qu'on vous donne. Une vision des
choses qui explique le très haut degré de corruption qui
affecte le fonctionnement de notre administration. Une administration
soi- disant publique mais qui n'a plus rien de public. Le sens de l'intérêt
général et du service public est complètement perdu
de vue et il est temps de faire quelque chose pour se ressaisir. Ce sont
des pratiques qu'il faut stopper.
N.B. J'ai exprimé cette opinion à peu près avec
les mêmes mots dans mon livre intitulé " Député de
la nation ", pages 156 - 157.
SUR LA POLITIQUE DE L'EQUILIBRE REGIONAL
J'ai exprimé sur cette question une opinion positive consistant à dire
que le président Ahmadou Ahidjo avait été bien inspiré d'adopter
cette doctrine de l'équilibre régional pour garantir l'unité nationale
qui signifiait prioritairement pour lui Intégrité territoriale.
Le président Paul Biya a également eu raison de continuer
dans cette voie. Et, avant de m'exprimer sur cette question dans cette
interview du 16 Mai conduite par le journaliste Ibrahim Cherif dans le
cadre de son émission " Actualités Hebdo ", j'avais
déjà écrit ce qui suit dans " Député de
la nation ", page 157 : " Que faire face à ce redoutable
problème ? Dans un pays qui compte plus de deux cents tribus comme
le Cameroun, il a semblé, dès le départ et sous
le président Ahmadou Ahidjo, que le principe des quotas et la
doctrine du développement régionalement équilibré étaient
la voie à suivre. Elle a été suivie avec plus ou
moins de rigueur. Elle a été critiquée par ceux
qui considéraient et considèrent encore peut-être
toujours qu'elle comportait en elle-même une certaine injustice,
et induisait plutôt un nivellement par le bas au lieu d'une promotion
des meilleurs. Ceux-là semblaient dire qu'il fallait laisser les
plus avancés continuer de creuser leur avance et les plus attardés
continuer de s'attarder…à l'arrière-train ! Je ne
pense pas que ç'eût été une politique garantissant
la paix sociale et l'unité du pays. "
Député de la nation
Presses de l'UCAC Yaoundé 2002
Page 157
SUR
LES ASSOCIATIONS TRIBALES ET CLANIQUES
La loi n° 67/LF/19 du 12 Juin 1967 interdisait les associations " présentant
un caractère exclusivement tribal ou clanique ". Un an auparavant,
le parti unique était créé, expression de la volonté du
président Ahidjo de renforcer le sentiment national chez tous
ses concitoyens. C'est le moment où les manifestations du " ngondo " des
Sawas à Douala vont être suspendues. En 1990, le 19 décembre,
le président Biya promulgue la loi n°90/053 du 19/12/1990
relative à la liberté d'association. Le même article
4 des deux lois ne cible plus directement les associations à base
tribale ou clanique ; elle déclare " nulles et de nul effet
les associations fondées sur une cause portant atteinte…à l'unité nationale, à l'intégrité territoriale
et à la forme républicaine de l'Etat " Cette nouvelle
loi est votée et promulguée en même temps que la
loi sur les partis politiques. C'est la libéralisation, la démocratisation,
c'est-à-dire en quelque sorte le retour à ce qui avait
fonctionné avant 1966, année où plusieurs partis
politiques se sont sabordé et ont consenti l'union dans un seul
parti. Le fait est que la plupart de ces nouveaux partis ont suivi le
découpage clanique et tribal pour leurs recrutements. L'unité nationale
peut-elle être considérée comme ayant reculé par
le seul fait de l'existence en grand nombre de ces partis politiques à recrutement
tribal et de ces associations fonctionnant sur la base de la fibre ethnique
? Ma réponse a été négative ici. Car en effet,
l'unité nationale ne peut être dite atteinte que si certaines
de ces associations engageaient des actions ouvertes qui lui soient nuisibles.
Mais tant qu'elles s'occupent des problèmes particuliers des villages
et des régions, on ne saurait les incriminer de quoi que ce soit.
Même au plus fort des " villes mortes ", ceux qui combattaient
le régime en place, les hommes au pouvoir, le faisaient dans le
cadre d'un Cameroun uni qu'ils voulaient diriger.
Cela ne veut pas dire qu'il faut encourager le sectarisme et la multiplication
des associations, fussent-elles tribales. Le sentiment d'appartenance
prioritaire à une tribu doit disparaître et il disparaîtra
avec le temps. Mais la démocratisation de la vie sociale et politique
aidant, on était bien obligé de constater ce qu'on a constaté.
L'unité politique se vit davantage dans le sentiment partagé par
tous, de vouloir vivre un destin commun .A cet égard, il nous
faut davantage proposer aux compatriotes des projets rassembleurs , à la
manière de ce qui est obtenu avec l'équipe nationale de
football , les lions indomptables.
QUELS AUTRES PROJETS RASSEMBLEURS ?
A cette question je ne pouvais donner qu'une indication. Il y a lieu
de faire quelque chose pour cimenter davantage le destin de nation bilingue
du Cameroun. A Cet égard on pourrait commencer par améliorer
les performances en bilinguisme des lycées qui portent précisément
cette étiquette. Par la suite et dans le cadre des conférences
internationales à héberger, le Cameroun pourrait envisager
de revoir la vocation de l'université de Buéa en matière
de formation des interprètes et des traducteurs en toutes les
langues intervenant dans ces conférences, y compris donc l'arabe,
le chinois et le russe par exemple.
Le problème anglophone n'est pas autre chose que la multiplication
des actions tendant à amener la grande majorité des Camerounais à parler
indifféremment français ou anglais à l'instar de
ce qu'une minorité fait aujourd'hui. On ne devra plus regarder
du côté de l'origine linguistique des gens, francophone
ou anglophone, mais la compétence, les capacités, pour
tenir n'importe quel emploi dans la république. Le problème
anglophone qui est posé par une minorité des compatriotes
concerne précisément cette question d'emploi et même
de la direction du Cameroun. Il s'agit de ceux qui pensent qu'ils doivent
aller ailleurs pour avoir une chance de diriger un Etat. La plupart de
nos compatriotes anglophones ne se reconnaissent pas dans un tel projet.
A PROPOS DES PRIVATISATIONS
On ne peut pas tout privatiser. Les institutions de
Brettons Woods ne s'occupent que d'argent et jamais de politique intérieure.
L'unité nationale
? Il nous appartient à nous-mêmes de la défendre
par tous les moyens et notamment en évitant de mettre en vente
des affaires comme celle de la Camair. Les Camerounais vibrent à l'unisson
quand il s'agit de leur compagnie de navigation aérienne considérée
symboliquement comme la " onzième province " du Cameroun.
Tout le monde se souvient de la levée de boucliers du jour où le
gouvernement a fait mine de vouloir vendre le Boeing 747 baptisé " Mont
Cameroun ". Mais c'est le Cameroun qu'on vend ! s'indignait-on !
Il faut remettre en marche l'Ensemble national ( ballets, orchestre,
théâtre) qui réunissait des comédiens et musiciens
de tout le pays, chantant et dansant les rythmes de divers terroirs du
Cameroun. Sous la direction de Francis Kingué dans le temps, cet
Ensemble a aussi fait rêver les Camerounais qui voyaient leur culture
nationale multiforme dignement représentée à l'extérieur../. |