A
PROPOS DE SOLIDARITE DANS L'ESPACE FRANCOPHONE
Conférence du 21 Mars 2005 au Centre Culturel Français de
Yaoundé A l’occasion d’une table ronde organisée
dans le cadre de la 35è Journée Mondiale de la Francophonie.
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TOUTE
- PUISSANCE , HYPERPUISSANCE ET IMPERATIF DE JUSTICE
" La toute-puissance d'une nation, pour être acceptée
comme régulatrice de l'ordre international, devrait faire la preuve
qu'elle s'appuie sur l'idéal de justice. Si le droit a besoin de
la force pour se faire respecter, la force elle-même se doit d'être
juste afin d'être acceptée et respectée. Et la question
que le reste du monde s'est toujours posée et repose avec acuité à l'occasion
de la seconde guerre du Golfe est celle de savoir si l' " l'hyperpuissance " du
moment est inspirée en tous ses actes par le souci de justice et
d'équité ou plutôt bien davantage par la volonté toujours égoïste
de dominer et de chercher à tirer le meilleur parti de toutes les
situations ? Même si les Etats-Unis d'Amérique sont aujourd'hui
perçus comme la nation prétendant régir les relations
internationales, toute autre nation qui se serait trouvée dans cette
position aurait fait l'objet des mêmes réflexions inspirées,
non par des humeurs et la subjectivité, mais par la raison et l'objectivité.
tant il est vrai que la toute-puissance, qu'elle appartienne à qui
que ce soit, a tendance à pousser vers l'abus du pouvoir caractéristique
de l' " l'état de nature " et de la loi de la jungle. "
Tiré de ma contribution dans l'ouvrage collectif :
" Une Lecture africaine de la guerre en Irak "
Editions Maisonneuve&Larose/Afredit, Paris, Déc.2003
Page 208-209
IL FAUT LAISSER DIEU A CHAQUE CONSCIENCE ET A TOUT LE MONDE
" Chaque nation est justifiée à défendre en
premier lieu et tout à fait légitimement, ses intérêts
propres. Mais aucune nation singulière ne saurait prétendre être
suffisamment inspirée par la justice divine pour avoir à jouer
de manière infaillible le rôle d'arbitre et de gendarme international.
Sans oublier que le rapport à Dieu est individuel et se trouve être
ici celui de tel ou tel dirigeant particulier ! Le fait d'être la
plus puissante des nations, loin de faciliter les choses, les complique
bien au contraire, tant il est vrai que la force superlative porte en elle-même
une non moins forte tendance à son usage abusif. La possession de
la force superlative devrait s'accompagner d'une éducation spéciale
destinée à en éviter l'abus. Nous ne sommes pas persuadé que
la seule fréquentation des églises, mosquées et synagogues
procure cette formation pour que chacun se sente fondé à mettre
en avant le nom de son Dieu pour justifier l'usage de sa force".
Tiré de ma contribution dans l'ouvrage collectif :
" Une lecture africaine de la guerre en Irak "
Editions Maisonneuve&Larose/Afredit, Paris 2003, page 210
DROITS DE
L'HOMME ET " LOI DU PLUS FORT " !
" Il n' y a pas de doute à ce sujet ;l'ordre mondial continue
d'être réglé par la loi du plus fort. Il en était
déjà ainsi hier, à l'époque du triomphe de
l'européocentrisme devenu occidentalo-centrisme. Quand on parle
de mondialisation aujourd'hui, on pourrait laisser penser que le monde
est une idée nouvelle ! A l'époque de l'européocentrisme,
tout se passait comme si la réalité-monde s'était
recroquevillée dans un coin du monde, l'Europe. Et que hors de l'Europe
il n' y avait point de monde. Le siècle des lumières lui-même
ne s'est-il pas obscurci en acceptant en son sein l'infâme traite
négrière officielle et l'esclavage ? Si la large diffusion
des connaissances anthropologiques et les nouveaux mouvements d'affirmation
de l'autonomie et de la personnalité culturelle des peuples longtemps
bâillonnés ont contribué à la reconnaissance
du droit à la différence, cela n'a guère modifié le
rapport des forces dans le monde. La mondialisation, sous ce rapport, à savoir
l'hégémonisme, n'est pas une nouvelle réalité mais
plutôt la déconstruction d'une ancienne tendance s'étant
exprimée à travers ce qu'on a appelé l'européo-centrisme,
aujourd'hui devenu occidentalo-centrisme".
Extrait de ma communication à la Conférence
De Vienne (Autriche) 12 Juin 1999 sur l'éthique
De la mondialisation
Voir " Global Ethics, illusion or reality ", p. 101-102
MONDIALISATION ET PRINCIPE DE SOLIDARITE
SYNTHESE DE MA CONFERENCE DONNEE LE 22 Juin 2005 AU CENTRE
CULTUREL ITALIEN DE YAOUNDE
La mondialisation comporte plusieurs aspects qui n’ont pas le même
niveau de visibilité. L’aspect le plus voyant est celui
de la communication. Le fait est que c’est un processus qui ne
peut être considéré comme achevé. Il est même
difficile de dire comment pourrait ou devrait se présenter sa
forme achevée ! Uniformisation des comportements et de tous les
systèmes et visions du monde sous une bannière déterminée
? Ou alors désordre et chaos généralisé en
vertu de l’idéologie du laisser faire et du laisser passer
?
En ne considérant que trois de ses aspects par exemple, à savoir
la mondialisation de la communication à travers les autoroutes de
l’information, la mondialisation de la circulation des capitaux et
la mondialisation des échanges commerciaux sous la forme du libre échange
généralisé, il apparaît à l’observation
que le principe de libre circulation qui les régit est faussé dans
l’exercice de son pilotage. La libre circulation de l’information
se fait à sens unique et permet de voir que le village planétaire
n’est qu’une virtualité dominée par 88% d’internautes
ne représentant que 17% seulement de la population mondiale ; le
libre flux des capitaux qui est supposé augmenter l’investissement,
la croissance et la prospérité ne s’intéresse
pas du tout à l’Afrique et ne se dirige que vers les régions
du monde où le capital peut s’optimiser au maximum et se reproduire.
La libre circulation des marchandises s’est faite à travers
une plus grande ouverture des marchés nationaux des pays en voie
de développement où elle est passée de 22,8% à 38%
de 1985 à 1997, alors que pour les marchés nationaux des
pays développés, cette ouverture n’est passée
que de 16,6% à 24% pour la même période.
Dans ce contexte, comment a pu fonctionner jusqu’ici la solidarité internationale
et plus particulièrement la solidarité entre pays développés
de l’hémisphère Nord et les pays pauvres de l’hémisphère
Sud ? C’est essentiellement à travers l’Aide publique
au développement (APD), la coopération et les partenariats
divers, les remises de dette, les fonds spéciaux, les agences de
développement dans le cadre bilatéral, etc. Le Nepad lui-même
n’a rien innové dans sa conception de cette solidarité puisqu’il
se ramène en dernière analyse à la présentation
d’une liste de demandes adressées au G7 : demande d’une
augmentation de l’aide publique au développement, demande
d’un apport plus important de capitaux privés, demande d’accès
aux marchés financiers, demande d’allègement de la
dette. L’idée de partenariat suppose la confiance des partenaires
les uns vis-à-vis des autres, la convergence des projets, l’acceptation
et le respect des règles du jeu, l’ouverture et la transparence.
Chacun doit y gagner. Ce n’est pas de la philanthropie.
Or, si on considère le projet des Africains du Nepad, à savoir
mettre un terme à la marginalisation continue de l’Afrique
et à l’accroissement du fossé qui les sépare
du monde développé, il n’est pas sûr que les
partenaires recherchés, membres du G7, prennent cette préoccupation,
ce projet, à leur compte. Ce n’est pas leur souci. C’est
pour dire que dès le départ, il n’ y a pas de convergence
des projets. D’un autre côté, quand les Africains s’engagent à éliminer
les conflits et à sécuriser les capitaux investis ou à investir,
ils ne peuvent inspirer que doute et que scepticisme de la part de leurs
interlocuteurs du G7.
La logique devant asseoir une solidarité relativement saine, réaliste
et objective entre le Nord et le Sud est à repenser. Elle ne saurait
plus se fonder uniquement sur les fonds publics mondiaux qui ne représentent
qu’environ 3% de la masse totale des capitaux circulant dans le monde.
Il y a la solidarité plus ou moins naturelle qui fonctionne entre
les économies qui se ressemblent comme celles des pays industrialisés
du Nord et à l’intérieur de laquelle on ne parle que
d’opération de mise à niveau et non de l’Aide
publique au développement, par exemple. Il y a la solidarité de
complémentarité inégalitaire, de division de travail
qui a fonctionné jusqu’ici entre les économies du Nord
réputées productrices et les économies des pays du
Sud réputées consommatrices. Il doit s’agir aujourd’hui
de repenser cette solidarité de complémentarité. La
nouvelle solidarité de complémentarité devra réserver
des fonctions de producteurs et de consommateurs à tout le monde,
dans un contexte de négociation des spécialisations ou de
particularisation de la production. Il s’agit d’une solidarité de
complémentarité qui va solliciter grandement les capitaux
privés dans le sens de l’investissement direct étranger
(IDE). Le drame est que les délocalisations industrielles dans le
cadre desquelles opèrent les investissements directs étrangers
sont perçues dans les pays industrialisés comme une menace
sur la sécurité de l’emploi des nationaux, alors qu’elles
sont vivement souhaitées par les pays en développement pour
des raisons exactement inverses.
Cette situation permet seulement d’envisager la forme de solidarité qui
pourrait s’appeler une solidarité négociée,
par opposition à la solidarité offerte unilatéralement
jusque là.
Des instances de dialogue et de négociation au niveau mondial ne
permettraient-elles pas de mettre en place, à l’initiative
du G77 ou G132 par exemple, cette nouvelle forme de solidarité de
complémentarité plus équitable et reposant sur la
prise en compte de la théorie des avantages comparatifs ?
Voir le texte intégral
La francophonie
et la diversité culturelle
(Synthèse conférence du 17 Mars 2001, université de
Yaoundé 1)
«
Défense et illustration » de la langue et de la culture françaises
au départ, le mouvement de la francophonie est apparue à un
moment donné comme un handicap à l’expression des cultures « différentes » et,
en particulier, des cultures ethniques véhiculées par des
langues locales appelées dialectes. La nécessaire adéquation
qui doit exister entre une culture et la langue parlée par ceux
qui la produisent et en sont les premiers consommateurs fait défaut à la
relation entre une langue étrangère, en l’occurrence
la langue française, et les cultures ethniques. Peut-on dire que
la langue française permet à une culture relevant de ce que
Henri Bergson appelle « société close » de sortir
de sa clôture et de se faire diffuser au-delà des frontières
de l’ethnie ?Est-il possible que la consommation de ces cultures
intéresse des consommateurs à l’extérieur des
aires culturelles initiales ? Souvent, pour satisfaire cet objectif, une relative altération
du produit à diffuser s’est avérée inévitable
pour des impératifs commerciaux liés, ici aussi, à la
loi de l’offre et de la demande. C’est alors que les formes
culturelles traditionnelles dominées par l’oralité fluctuante,
par exemple, se voient abandonnées au profit des formes et genres
empruntés, mais correspondant aux habitudes d’une « société ouverte » ou
mondiale. Dans ce contexte, quelle place pourrait encore être réservée à la
volonté de sauvegarder une relative pureté ou une quelconque « authenticité » ?
La francophonie ne saurait survivre à elle-même qu’en
acceptant le principe d’une fécondation mutuelle de toutes
ses composantes culturelles, y compris les transformations de la langue
française elle-même par ses utilisateurs dont elle n’est
pas la langue maternelle. Il existe déjà un français
d’Afrique qui devrait être considéré comme une
nouvelle langue forgée en situation de nécessité communicationnelle. La francophonie a franchi une grande étape le jour où elle
est devenue une organisation intergouvernementale traitant de tous les
aspects de la vie des nations concernées par elle : économie,
politique, culture. Dans ce vaste ensemble marchand et de coopération,
il est attendu que les cultures ethniques puissent bénéficier
d’un soutien qui leur permette de passer du statut de folklores,
expressions de cultures populaires, à celui d’expressions
culturelles marquées d’un sceau nouveau d’universalité.
Le prix à payer pour cette mutation étant la renonciation à leur
pureté originelle et l’acceptation des ingrédients
modernistes sans lesquels se verrait toujours manquée leur insertion
dans le contexte de la société mondialisée./.
(lire texte intégral) |