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Intervention, texte intégral

MON OPINION SUR...

« DEVELOPPEMENT DURABLE », CROISSANCE ET LUTTE CONTRE LA PAUVRETE

                C’est dans le rapport publié en 1980 par l’ « Union Internationale pour la Conservation de la nature » qu’apparaissent pour la première fois l’expression et la notion de « développement durable ».En 1987, la « Commission Mondiale sur l’Environnement et le Développement » constituée par l’Organisation des Nations Unies entérine cette notion dans la même formulation et en propose la définition : « c’est le développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ». C’est un concept proposé pour remédier aux excès et aux dysfonctionnements d’un mode de développement dont les limites ont été fortement dénoncées dès le début des années 70. En fait, tout part du catastrophisme et de l’alarmisme exposés dans le Rapport du Club de Rome publié en 1972 et selon lequel la poursuite de la croissance économique entraînera au cours du 21è siècle et plus précisément vers l’An 2100 une chute brutale de la population à cause de la pollution, de l’appauvrissement des sols cultivables et de la raréfaction des ressources énergétiques.
            Se fondant sur cet examen de la situation et sur les résultats des projections mathématiques ainsi que des simulations informatiques, le rapport du Club de Rome a tout naturellement proposé qu’une halte soit imposée à la croissance. « Halte à la croissance » est du reste le titre de ce rapport qui signale en effet que si tous les Etats de la planète venaient à adopter l’ « american way of life » qui consomme près du quart des ressources de la Terre pour seulement 7% de la population, il faudrait l’équivalent de 5 ou 6 planètes Terre pour satisfaire la population mondiale entière, or nous ne disposons que d’une et unique planète Terre ! La généralisation, par pure hypothèse mathématique encore de la moyenne française du train de vie n’exigerait pas moins de 3 planètes Terre pour subvenir aux besoins de tous.
            Devant une telle réalité, même hypothétique et aléatoire, que pourrait valoir le souhait, pourtant légitime, de croissance et de prospérité des pays en voie de développement ? Quand on sait qu’il ne saurait y avoir de décollage économique sans industrialisation et que beaucoup de pays africains n’ont toujours pas décollé économiquement, comment leur demander de modérer la consommation des ressources naturelles qui sont demeurées en jachère depuis toujours sous l’étiquette plus ou moins rassurante de « richesses naturelles » ?A cette question le rapport du Club de Rome répondait sans détours qu’ « il était à craindre que la satisfaction de ce souhait n’implique une dégradation encore plus importante de la biosphère ». Il y a lieu de s’émouvoir devant cette perspective quand on appartient à un pays du Sud, c’est-à-dire à une région de la planète qui n’est que très peu responsable et très peu bénéficiaire de la course effrénée à la croissance.
            Dira-t-on que le rapport de 1972 du Club de Rome, avec son catastrophisme et son alarmisme, n’engage que ses rédacteurs et ne serait pas partagé par tout le monde aujourd’hui ? Il n’empêche qu’en 1987, Le Rapport Brundtland, du nom de la Présidente de la « Commission Mondiale sur l’Environnement et le développement », après avoir reconnu que « la dégradation de l’environnement, considérée d’abord et avant tout comme un problème des pays riches et comme un effet secondaire de notre (leur) richesse industrielle, est devenue une question de survie pour les pays en voie de développement », propose comme ligne de conduite et objectif aux dits pays en développement « une stratégie de lutte contre la pauvreté ». On peut en effet lire ce qui suit au paragraphe 3.2 du chapitre concerné : «  Une stratégie visant à lutter spécifiquement contre la pauvreté est donc l’une des conditions essentielles pour assurer un développement durable ». On est fondé à se demander si le concept de « lutte contre la pauvreté » n’a pas été forgé en 1987 pour se substituer à celui de croissance dans les pays en voie de développement. Il y est du reste surabondamment utilisé par les experts des institutions de Brettons Woods, et adopté par les nationaux. Ce qui voudrait dire que le « développement durable » ne proposerait aux pays pauvres qu’une sorte de minimum de développement consistant à faire franchir le seuil de pauvreté pour accéder à la condition de riche par le seul fait de passer de l’autre côté de la ligne de démarcation ?
            La doctrine du développement durable qui veut « que le développement au service des besoins humains et de la société des hommes ne se paie pas d’une dégradation continue de l’environnement biophysique et de l’épuisement des ressources naturelles » ne compliquerait-elle pas davantage les « affaires » de l’Afrique en particulier ? Si son industrialisation classique s’est vue indéfiniment retardée, il serait tout à fait illusoire de fonder de solides espoirs sur une industrialisation « durable », c’est-à-dire écologique et environnementale. Ici encore, les pays du Nord continuent d’accentuer leur avance sur les pays du Sud. Le Grenelle de l’Environnement en France est là pour l’attester, avec ses 268 engagements numérotés pour des recherches à faire faire et des financements à dégager. En jetant un coup d’œil sur ces propositions, on tombe sur l’engagement n° 222 libellé comme suit : «  Lutte contre le commerce illégal du bois et développement des alternatives à l’exploitation destructrice des forêts, sous forme de gestion de ces espaces. Une attention sera portée sur le bassin du Congo ».
            C’est alors que surgit une autre préoccupation dans notre esprit, celle de la nécessité de la création d’une  gouvernance globale garantissant la cohérence de la mise en œuvre de cette nouvelle idéologie. En effet, la gouvernance de ce projet ou de ce programme, (nous pensons effectivement à l’Agenda 21 qui accompagne le Rapport Brundtland et contient une longue série de mesures proposées à l’application par les uns et les autres) se trouve dispersée entre les multiples gouvernances locales ne fonctionnant pas au même rythme. Il apparaît nécessaire de souligner l’idée selon laquelle le « développement durable » devrait constituer l’attribution principale d’une gouvernance globale en train de naître et qui ne s’est intéressée jusqu’à présent qu’aux seules questions présentant une allure catastrophiste. Or, pour aller dans le sens de la solidarité qui lie les peuples de toutes les nations face à toute catastrophe menaçant la planète, il importe que la question du développement, « durable » ou pas, occupe une place centrale dans l’agenda de la gouvernance globale. C’est au sein d’une telle instance que pourrait être décidée telle ou telle répartition concertée des responsabilités et des aires géographiques spécialisées pour des productions correspondant à l’application  du principe des avantages comparatifs.
            Dans cette logique, on verrait bien la France associer des représentants des Etats riverains du bassin du Congo à la mise en application de l’engagement 222 du Grenelle de l’Environnement, par exemple. S’il faut faire remplacer la coupe et la vente du bois de nos forêts par la vente sur pied du carbone, ou de l’oxygène, dont ces forêts constituent des réserves, il faudra bien que toutes les parties prenantes participent à l’évaluation de l’oxygène à vendre ainsi qu’à la fixation de son prix !
            Au lieu de la gouvernance globale, L’Agenda 21 renvoie au sens des responsabilités de chacune des parties prenantes séparément : individus isolés, entreprises, gouvernements, administrations locales, voire même la très diffuse communauté internationale. Chacun est invité à concilier dans ses activités et ses projets, la performance économique, le respect de l’environnement et des individus. Dans cette logique, il est rappelé à chacun que si on ne s’occupe que de l’économique et de l’écologie, on pourrait promouvoir un développement viable ; si on se concentre uniquement sur l’économique et le social, on devrait, en principe, promouvoir un développement équitable ; et si, enfin, on ne se concentre que sur le social et l’écologique, on pourrait œuvrer en faveur d’un développement vivable. Mais aucun des trois piliers pris séparément ne serait « durable ». C’est la combinaison des trois qui pourrait favoriser un développement durable. Et nous ajoutons : à condition qu’un tel programme soit pris en charge, pour sa cohérence intrinsèque et globale, par une instance jouissant d’une reconnaissance et d’une autorité mondiales. Ce qui est loin d’être le cas. Dans un tel contexte, ce sont les pays du Sud (dont certains demandent déjà aux ménagères des zones rurales de cesser de faire recours au charbon de bois !) qui continueront de manquer de force suffisante pour se maintenir dans la voie de la création des richesses, donc de la croissance et pas seulement dans celle de la lutte contre la pauvreté. /

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