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Actualité du 20-03-2007

communication du Professeur Njoh Mouelle sur "la mondialisation"

"LA MONDIALAISATION ET LE PRINCIPE DE SOLIDARITE"

Je pense que la mondialisation ne saurait être considérée comme viable si elle ne se réalise pas autour d’une mise en œuvre de la valeur de solidarité à inscrire dans une organisation géo-économique de la production tournant le dos au «laisser-faire» qui semble être son principe fondamental.



En effet, les formes prises par l’expression de la solidarité internationale à travers les pratiques d’aide publique au développement et de remise gracieuse de dettes des pays pauvres, n’ont pas empêché que le fossé continue de se creuser entre les riches et les pauvres.



Les illustrations de ce fossé sont si nombreuses, évidentes et connues qu’il ne me semble pas nécessaire de chercher à en produire d’autres. Rappelons tout de même qu’avec une population de 785 millions d’habitants, l’Afrique ne représente que 0,8 % du nombre d’internautes dans le monde. Autrement dit, avec 13 % de la population mondiale, l’Afrique pèse moins de 1 % dans le cybermonde. Pendant ce temps, 88 % des internautes que compte le monde vivent dans les pays industrialisés qui ne représentent que 17 % de la population mondiale.



Si nous considérons un autre article de foi de la mondialisation qui consiste à laisser entendre que le libre flux des capitaux qui est supposé augmenter l’investissement, la croissance et la prospérité se dirige aux quatre coins du monde, force est de constater que les mouvements des capitaux ne s’intéressent pas du tout à l’Afrique et se dirigent prioritairement vers les régions du monde où le Capital peut s’optimiser au maximum et se reproduire. La place de l’Afrique dans le commerce Mondial ne représenterait que 1 %.



Comment faire intervenir un concept éthique tel que celui de solidarité dans un contexte où la plupart des gens n’entendent que le discours de leurs intérêts personnels, de groupes et des nations ? La solidarité dont il peut être question ici aura toujours du mal à se faire une place dans les échanges, si elle n’est pas comprise comme une volonté de solidarité, un choix de raison de la part des divers protagonistes. Nous disons que cette volonté de solidarité ne s’est exprimée jusqu’ici que de manière minimale sous la forme d’assistance technique, d’aide publique au développement et de remises ponctuelles de dettes.

C’est l’expression d’une solidarité inspirée par une mondialisation qui, malgré les apparences et la terminologie utilisée, se structure, non pas comme une globalité unifiée, mais plutôt comme le règne de la multiplicité et de la dispersion du sens.



Il a été souvent relevé que la notion de globalisation prépare mieux le terrain de la solidarité que celle de mondialisation. Et pourtant l’idée de « globe » dans l’un, et celle de monde dans l’autre, sont des désignations de la même chose, d’une chose dont l’une des caractéristiques principales se trouve dans l’indication d’une unité organisée.



Telle que manifestée jusqu’à présent, l’organisation n’a point obéi à la logique d’inclusion, mais davantage à celle d’exclusion de cette globalité ou de ce monde. Les distributions d’aide publique au développement et les assistances techniques diverses comme expressions de solidarité ne pouvaient pas souligner autre chose que l’extra-mondialité et la distance voire même le «fossé».



Ce n’est pas de la solidarité fonctionnant à l’intérieur d’un espace commun. En réalité, tout se passe dans ce contexte comme ci celui qui aide et celui qui est aidé s’excluent l’un l’autre comme ne faisant pas partie du même espace. Et pourtant l’idée de solidarité laisse entendre que ceux qui agissent en solidarité et ceux en faveur desquels les premiers agissent, se sentent partager la même responsabilité. Ce qui veut dire que l’idée de solidarité n’a jamais été celle d’une dissymétrie ou d’une unilatéralité d’agissements solidaires telle que le fonctionnement de la mondialisation le laisse voir sous nos yeux, une mondialisation synonyme d’extension unilatérale d’un centre initiateur de tout, vers une périphérie à submerger. L’idée de solidarité devrait supposer celle de réciprocité et de mutualité.



Cela se voit et se vit plus clairement entre semblables. Par exemple la solidarité entre pays développés, la solidarité entre pays pauvres ou sous-développés. Si les pays développés se sont préparés à l’avènement du libre échange en baissant progressivement les barrières douanières entre eux, les pays pauvres quant à eux ont maintenu élevés leurs tarifs douaniers qui constituent l’une des sources principales de recettes pour les caisses des Etats. Et c’est avec appréhension que l’échéance de janvier 2008 est attendue, échéance qui devrait voir tomber complètement les barrières douanières de nos pays. D’une manière générale, il semble plus naturel et plus facile de vivre une relation de solidarité avec des semblables. Or la mondialisation met face à face les semblables de l’hémisphère Nord et les semblables de l’hémisphère Sud, pour simplifier. En parlant de semblables, nous pensons davantage et principalement aux économies et à leurs niveaux si différents !

Ce que l’Union Européenne pouvait faire en faveur des économies faibles des candidats à l’admission en son sein, ne pouvait pas et ne peut pas être fait en faveur des économies archi-faibles des pays précisément pauvres. Cela s’est appelé la mise à niveau, une notion jamais usitée dans les expressions de solidarité en direction des économies dissemblables de l’hémisphère Sud.



La solidarité manifestée en direction des économies faibles de l’hémisphère Sud par celles fortes de l’hémisphère Nord aura été jusque là une solidarité de complémentarité. C’est une solidarité qui a une tendance à figer chacun dans son rôle ou sa fonction : le Nord produit tandis que le Sud consomme. Dans la logique de cette solidarité de complémentarité et d’interdépendance inégalitaire et inévitable, les pays en voie de développement auraient vocation à demeurer en permanence en voie de développement. Et c’est bien ce que traduisent les statistiques économiques tous les ans, lorsqu’elles font constater que le fossé ne cesse de se creuser entre le Nord et le Sud, entre les riches et les pauvres. Et pourtant, une certaine forme de solidarité fonctionne et révèle malheureusement son inefficacité.





D’où la nécessité de repenser et de refonder une solidarité viable entre le Nord et le Sud, fût-elle toujours une solidarité de complémentarité, à défaut d’être une solidarité de mise à niveau, beaucoup plus réaliste quand il s’agit d’économies de niveaux comparables, bref de semblables.



Car, malgré les apparences, la mondialisation n’est pas totalement un règne du laisser-aller et du libéralisme sans freins et sans règles. Le marché a ses règles ; malgré les apparences, encore, ce n’est pas dans le même monde que nous évoluons, déjà, à l’intérieur de chaque hémisphère, et a fortiori entre l’hémisphère Nord et l’hémisphère Sud. C’est pourquoi il ne s’agirait pas de se fier à la nature des choses, aux seuls mécanismes plus ou moins automatiques de régulation des choses. Nous avons fait état au départ, du facteur « volonté » de solidarité devant s’exprimer et se traduire par la négociation d’une solidarité par laquelle, comme a dit un homme politique français, « le Nord devra « franchir la frontière technologique » qui rendra ses produits complémentaires et non plus concurrents des pays en voie de développement ». La solidarité négociée devrait ainsi prendre la place de la solidarité offerte.



Du côté des pays en voie de développement, il y aurait également lieu d’abandonner la voie longtemps fréquentée des «demandes adressés aux pays du Nord, la voie de la main tendue comme lorsqu’il s’est agi une fois, de demander la création d’un «Fonds mondial de solidarité» ou d’une « nouvelle architecture financière instrumentale » (5 octobre 2000, débats de la Commission Economique et sociale de l’AG des Nations Unies).



C’est bien dans la direction de la définition des axes de production débarrassée à la fois de la volonté d’exploitation servile et d’esprit de concurrence de la part des économies fortes du Nord à l’égard des économies faibles du Sud que les réflexions et les démarches devraient être faites. Et de toute évidence, c’est bel et bien dans cette direction que la bonne compréhension de la globalisation en tant que vision unitaire d’un destin commun de l’humanité commanderait de s’orienter. Sans vision unitaire, il n’y a pas de mondialisation ni de globalisation susceptibles de promouvoir le sens de la solidarité. Et au cœur de cette vision unitaire, il devrait y avoir la conscience d’être lié par un destin commun, celui de l’humanité entière.



Je vous remercie de votre attention.
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(C)octobre 2007 Réalisation BDSOFT