J'avais eu l'occasion, par deux fois, de voir mon nom figurer sur la
liste des membres du comité de rédaction pour les congrès
de l'UNC ( Union Nationale Camerounaise), parti créé par
le premier président du Cameroun indépendant, Ahmadou Ahidjo.
En décembre 1974, lors des assises du Conseil national de l'enseignement
supérieur, instance présidée par le chef de l'Etat,
j'avais joué le rôle de secrétaire d'une des commissions
présidée par Vroumsia Tchinaye. Celui-ci avait été, à ses
propres dires, impressionné par le fait qu'en même temps
que je prenais des notes et l'aidais à faire le point sur l'évolution
des débats, je le surprenais par la facilité avec laquelle
je soumettais, séance tenante, des formulations de projets de
résolutions qui permettaient de rallier des points de vue apparemment
irréductibles des intervenants. C'est à partir de là qu'il
avait pensé proposer que je fusse associé aux travaux du
comité de rédaction du congrès qui devait suivre
l'année d'après, en 1975 à Douala ainsi que pour
celui de 1980 à Bafoussam. Au sein de ce comité et en matière
de rédaction, les membres avaient tout juste à relire et
améliorer l'écriture des rapports d'activités des
divers présidents des sections départementales du parti.
En effet, jusqu'au congrès de Bafoussam, une journée entière était
prévue dans le programme pour la présentation de leurs
rapports d'activités par les responsables des sections départementales
du parti unique. Beaucoup de ces rapports étaient écrits
dans une langue et un style qui laissaient souvent à désirer.
C'est pour cela que le comité de rédaction avait été institué,
non pas pour la rédaction des choses importantes ( discours, projets
de résolutions, rapport général d'activités
du président du parti,p.e), mais pour faire la toilette des rapports
qui étaient souvent lus d'ailleurs dans une salle de congrès
en pleine somnolence !
Ce n'est donc pas de ce côté-là que je dois aller
situer mon entrée en politique. Il s'agissait d'une tâche
ponctuelle à laquelle on associait des enseignants, y compris
ceux qui continuaient d'être tenus en suspicion comme étant
des opposants " dormants ", comme on dirait aujourd'hui. Je
n'ai occupé aucune fonction politique pendant l'ère du
premier président du Cameroun. Celui-ci avait préféré me
maintenir dans mon milieu académique, malgré l'action sournoise
de tous ceux qui faisaient écrire des rapports m'accusant tout
le temps d'être l'instigateur des grèves des étudiants.
A quel moment situer mon entrée en politique dans ma vie active
? Ce sera au début du premier mandat du président Biya.
Ce n'était pas par l'entremise d'une nomination à un quelconque
poste. Bien sûr, en Août 1984 , le président Biya
me nomme à la tête de l'institution universitaire de Douala
en qualité de directeur général de ce centre universitaire.
Mais ce n'était pas un poste politique. C'était plutôt
l'occasion de me permettre de tenir le poste de responsabilité académique
qui me manquait, à savoir celui de chef d'institution universitaire.
Voilà ! Je crois que mon entrée en politique s'est opérée à travers
une initiative personnelle que j'ai prise peu de temps après la
nomination de François Sengat Kuo dans les fonctions de Secrétaire
politique, donc de numéro 1 au sein du Secrétariat du Comité Central
de l'U.n.c. Nous sommes en Mars-Avril 1984 quand je prends l'initiative
de faire organiser en l'honneur de François Sengat Kuo, une grande
réception à Yaoundé par la communauté sawa
de Yaoundé. Peu de temps auparavant, j'avais eu vent de ce qu'il
souhaitait une telle chose, conscient qu'il était de la mauvaise
opinion que ses " frères " sawa avaient de lui, à partir
d'une réflexion qu'il aurait faite un jour, et selon laquelle
il ne devait sa position auprès d'Ahidjo à personne et
que seule " sa plume ", donc ses diplômes, lui auraient
valu d'être là où il était, à savoir
un très proche collaborateur du chef de l'Etat. Je réunis
donc quatre amis dans mon domicile de fonction de directeur de l'E.N.S.
: Mbonjo Ejangue, le colonel Moukori Mbappe, Michel Epangue et Naah Robert.
Ils approuvent mon idée. Nous nous organisons et réussissons à offrir
une très belle réception au domicile de M. Mbonjo Ejangue, à l'époque
secrétaire général du ministère de la santé.
Bien que je ne lui en aie rien dit moi-même, Sengat Kuo a vite
pris connaissance du fait que j'étais l'initiateur de la fête
que ses " frères Sawa " avaient décidé de
lui offrir. C'est ainsi qu'il va me convoquer un jour, avant la fin de
l'année académique 83-84 dans son bureau. Il était
alors ministre de l'information. Il me demande de choisir moi-même
les membres d'une petite équipe devant rédiger un document
important dans la perspective du congrès de l'U.n.c prévue
pour Bamenda 1985. Des détails sur la destination de ce projet
ainsi que sur l'identité des personnes rassemblées autour
de moi ne pourront être révélés que plus tard.
Le fait est que c'est au congrès de Bamenda qui a vu l'U.n.c devenir
le R.d.p.c. que j'ai été coopté en qualité de
membre suppléant du Comité central.
De retour de ce congrès de Bamenda, le secrétaire politique
Sengat Kuo décide d'organiser une tournée de plusieurs équipes
dans les provinces pour expliquer les changements intervenus à Bamenda.
Je suis intégré dans la délégation qu'il
va diriger lui-même à travers les chefs-lieux des départements
de la province du littoral : Douala, Edéa, Yabassi, Nkongsamba.
Des exposés tout faits avaient été élaborés
par le secrétariat du comité central. Il ne restait plus
qu'à les lire. J'ai été toutefois le seul à s'être
vu donner la liberté de préparer son intervention portant
sur le type d'homme que le " Renouveau " entendait promouvoir.
Cette liberté qui m'a été donnée, le thème
traité, la manière très libre avec laquelle je présentais
la question, m'avaient valu un énorme succès d'applaudimètre
tout au long de notre périple.
J'étais en poste au Centre Universitaire de Douala ; et c'est
bien là que, nanti de ma casquette de membre suppléant
du comité central, je vais être invité à prendre
part à diverses rencontres , réunions et manifestations
politiques dans le département du Wouri, à Douala Je peux
dire que c'était véritablement le point de départ
de mon activité politique.C'est de Douala que le président
Biya me fera venir pour entrer dans son cabinet avec le titre de Conseiller
du Président de la République./.
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