L’Afrique en retard d’une révolution culturelle ?
Njoh Mouelle : Je crois que l’Afrique en particulier, et les pays non-industrialisés en général, ont une révolution décisive à engager. Elle est culturelle et pourrait être déclenchée à partir du renversement des féodalités qui continuent de pérenniser ici et là des solidarités communautaristes en totale contradiction avec les exigences de l’Etat de droit moderne.
Le problème, par rapport à ce que vous proposez vient de ce que vous vous arrêtez à l’opposition des intérêts de groupes ethniques et ne mentionnez nullement l’impact de l’organisation de la production, industrielle ou pas, dans la création de nouveaux clivages notamment ceux des classes sociales. Vous dites bien qu’en Europe l’apparition des classes sociales a été déterminante dans l’apparition d’une nouvelle culture associée à la naissance de la République et de la démocratie. Comment penser que des partis politiques calqués sur les clivages ethniques pourraient ignorer l’expression d’autres intérêts n’ayant plus rien à voir avec la fibre ethnique et seraient susceptibles de trouver des échos dans des partis regroupant d’autres ethnies ?
Thierry Michalon Non, non, cher collègue, je considère comme vous que l'industrialisation a fait beaucoup, en Europe, pour désagréger les solidarités claniques du monde rural - donc permettre l'apparition du citoyen, de la démocratie et des valeurs républicaines - et que ce qui s'est passé en Europe se passerait certainement en Afrique en cas d'industrialisation massive. Mais celle-ci ne se décrète pas ! Par ailleurs je vous renvoie à votre propre espoir selon lequel parmi des partis ethniquement homogènes les oppositions fondées sur des intérêts économiques opposés se feraient jour, entraînant ainsi une véritable vie politique, c'est-à-dire la confrontation de programmes de gouvernement différents en fonction des intérêts qu'ils privilégieraient.
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L'homme politique
