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Extraits de quelques oeuvres

DEPUTE DE LA NATION

 Campagnes électorales en fêtes…
 L’opposition et les gouvernements d’union nationale
 Séquelles du parti unique

CADEAUX , FETES ET " ANIMATIONS " EN CAMPAGNES ELECTORALES : p.52-53

En effet, là où la pauvreté sévit et le sous-développement se fait chronique, les populations manquent évidemment d'occasions de faire la fête ; la priorité est donnée à la survie…Chacun se préoccupe d'abord et avant tout de sa pitance quotidienne. La fête semble être une exception et un luxe. Et les gens qui ne peuvent pas toujours s'offrir des fêtes sautent sur les premières occasions rencontrées, mieux, cherchent des astuces qui pourraient leur permettre de faire la fête aux frais d'autrui. Les contextes de campagnes électorales et leurs suites sont des occasions de ce genre. Les populations en zones rurales ( et même en villes) ne sont pas sensibles aux discours programmatiques et idéologiques. Tant pis pour les candidats qui infligent aux populations des discours savants, égrenant des paramètres de saisie des réalités macro et micro-économiques ( PIB, PNB, taux d'inflation, taux de croissance…). Un jour d'Avril 1997, quand je suis allé annoncer ma candidature à Yabassi, j'ai entendu une femme dire, à la fin de la réunion chez le président de la sous-section RDPC de Yabassi-Centre : Mais , il s'en va, il ne nous a même pas donné à boire ?Cette réflexion s'adressait à moi. Je fis semblant de n'avoir rien entendu. Ils avaient été convoqués pour quatorze heures. Les réunions similaires que j'ai tenues le même jour avant celle de quatorze heures ayant quelque peu débordé le programme horaire prévu, mon arrivée avec retard à Yabassi était inévitable. Les militants s'en sont plaints et laissaient l'impression des gens qui s'attendaient à ce que je compense leur longue attente par un verre de bière ! C'est cela la réalité dont il faut tenir compte. Elle ne saurait être ignorée impunément. Ce qui ne veut pas dire qu'il faut s'en rendre l'esclave. Tout l'art consiste à savoir l'exploiter judicieusement. Va-t-on me quereller sur l'utilisation du mot exploiter ici ? Il s'agit d'une attitude réaliste dont tout le monde a besoin en politique. Et il en est de la politique comme de la vie elle-même. Elle demande une bonne dose de réalisme. Les évolutions sociales et les changements de mentalités se font très lentement, et jamais par décrets. En ce qui concerne la question qui me préoccupe ici, à savoir les fêtes offertes aux électeurs avant et après les scrutins, il me semble que quelque chose ne changera dans les attentes des populations que lorsque le développement économique et la lutte contre la pauvreté qui est son objectif auront franchi un seuil tellement significatif qu'une relative aisance aura commencé à être vécue jusque jusque dans les zones rurales. Il faut que la richesse remplace la pauvreté pour voir surgir d'autres comportements. Les gens s'offriront des banquets eux-mêmes ;ils en auront les moyens , cesseront de guetter les occasions que fournissent les élections, les obsèques et autres funérailles, par exemple. Lorsqu'au Cameroun nous aurons accédé à cette étape du développement, il ne sera pas rare de voir des gens s'offusquer des cadeaux de toutes sortes, que des élus ou des candidats aux élections se hasarderaient à leur offrir. Il n' y aura plus ( ou presque plus ) de gens semblables à cet électeur désabusé, auteur de la lettre publique : "A mon Honorable député" parue dans le n° 196 de la semaine du 21 au 27 JUIN 1999 du journal "Perspectives Hebdo" dans laquelle il écrivait :

" L'argent que tu nous a donné la veille du scrutin avait été utilisé pour faire ta campagne électorale. On avait convaincu les autres pour plaider ta cause. On leur avait dit que tu étais le meilleur choix, qu'il n'y avait que toi, que ton parti allait nous sortir de la pauvreté qui semblait devenir une malédiction pour notre village et notre pays. Tout cela est loin aujourd'hui. Je ne t'ai plus revu. Non ! je ne te vois qu'à la télé, au cours des interviews que tu accordes aux journalistes. Ceux-ci savent te faire des éloges et tu ne manques jamais de sauter sur ces occasions-là pour soigner ton personnage. Tu as vraiment pris du poids. Comme les autres grandes personnalités de ce pays, tu as très vite penséà préparer un avenir radieux à tes enfants…Quelle belle aisance matérielle ! La famine, la pauvreté, le chômage, et que sais-je encore, seront pour eux de vains mots…

Pour imaginaire que puisse paraître cette lettre ouverte à un député, elle ne manque pas de refléter la réalité de la mentalité ambiante actuelle des populations souffrant de pauvreté jusqu'à cultiver la mesquinerie et le regard envieux, sur fond de malentendu sur le rôle et la mission réels du député./.

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L'OPPOSITION ET LES GOUVERNEMENTS D'UNION NATIONALE :p .129-130

Un réel problème se pose dans nos pays, au sud du Sahara, c'est celui des gouvernements dits d'union nationale. Ils sont la contradiction flagrante du mouvement de démocratisation engagé depuis le début de la décennie 90. Il a bel et bien existé des circonstances troubles particulières qui ont imposé dans certains pays, la constitution de gouvernements comprenant les représentants de tous les partis politiques importants. Cela s'est toujours voulu transitoire, en attendant de préparer les conditions d'un retour à une vie démocratique normale, comportant un parti ou une coalition qui gouverne et, en face, pour les interpellations et l'évaluation au jour le jour, une opposition qui veille à la défense des intérêts du peuple tout entier et non d'une fraction de celui-ci. Lorsqu'en décembre 1999 le général Robert Gueï a perpétré son coup de force en Côte d'Ivoire, il a été amené, dans une phase que tout le monde exigeait transitoire, à constituer un gouvernement regroupant des gens du Fpi de Gbagbo, du Pdci de Konan Bédié et Fologo, du Rdr de Ouattara et de quelques autres. Un assemblage qui ne pouvait pas jouir d'une harmonie quelconque, ni encore moins d'une réelle cohésion. Mais, en dehors des situations comme celle-là, que ferait-on d'autre sinon retourner à l'époque des partis uniques si on veut que se généralise la pratique des gouvernements d'union nationale ? L'argument souvent avancé en leur faveur consiste à dire qu'ils garantissent la paix et la sécurité dans le pays. On reste ainsi ancré dans la logique du " partage du gâteau national ". Il faut que toutes les forces nationales ayant une représentation valable se sentent concernés par la gestion de la chose publique. Je l'ai déjà écrit plus haut, cette vision des choses et cette pratique consacrent l'enterrement définitif des préoccupations de programmes et de projets de société. Car, si tous les partis politiques qui se retrouvent au sein d'un même gouvernement peuvent prétendre avoir un même projet de société, alors, ils ne méritent pas d'être distingués en une infinité de partis ! S'entendent-ils davantage sur ce qu'on appelle parfois " plates-formes communes " de gouvernement ? C'est possible. Mais souvent, c'est pour la pure forme. Je viens de rappeler ci-dessus les critiques que les militants de l'Upc faisaient en 1994 à leurs ministres entrés dans la coalition avec le Rdpc. Il en fut de même de la présence de deux grands dignitaires de l'Undp dans le gouvernement Rdpc, ceux-là mêmes qui avaient créé un parti distinct de l'Undp baptisé Andp et qui ne réussit à gagner aucun siège aux législatives de 1997.

J'ai parlé d'un retour au temps du parti unique. C'est vrai et c'est faux à la fois. C'est faux en ce sens qu'au temps du parti unique, tous les membres du gouvernement se tenaient tranquilles, respectueux de l'autorité du chef du parti qui était en même temps chef du gouvernement, ou de l'exécutif, si on veut. Les directives données à l'occasion des conseils ministériels étaient prises au sérieux par tous les membres du gouvernement qui se sentaient redevables, tous, à l'égard d'un homme. Or, qu'est-ce qui s'est donné à observer dans ces situations de faux retour au parti unique ? Il s'est passé que chacun des " coalisés " se comportait comme si le département ministériel dont la gestion lui était confiée, était à considérer comme la portion du Cameroun qui lui était cédée. Il se croyait tout permis ; autorisé à prendre des initiatives qui auraient exigé qu'il sollicitât le feu vert du chef du gouvernement. En 1992-97, nous avonsassisté à des abus de pouvoir inqualifiables. Un ministre qui, sous prétexte d'avoir créé un parti politique dissident d'un premier, s'est cru autorisé à brader par-ci, par-là le patrimoine foncier de l'Etat

Député de la Nation
Presses de l'Université Catholique d'Afrique Centrale
Yaoundé, Janvier 2002
p.129-130

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SEQUELLES DU PARTI UNIQUE ( L'AUTOCRATISME ) : 137-139

Qui pourrait nier qu'aujourd'hui encore persiste un certain autocratisme dans tous les partis politiques, avec son accompagnement naturel de la pratique du culte de la personnalité ? Sans aller très loin il suffit de s'arrêter au spectacle du flon-flon protocolaire dont s'entourent tous les déplacements de l'administrateur du secrétariat du comité central du Rdpc. Dans un chapitre du début de ce livre, j'ai relaté les longues attentes des réunions du groupe parlementaire au siège du comité central et les entrées en scène tambourinées de celui sans qui la réunion du groupe ne pouvait pas commencer. Il n' y a là rien à voir avec une gestion démocratique et militante d'un parti politique, fût-il le parti au pouvoir. Les témoignages que rapportent tous ceux qui ont fréquenté ces derniers temps le siège de notre parti à Yaoundé font état d'un climat de courtisanerie réinstallé dans la direction d'une association politique à laquelle les gens ont adhéré librement. Qui dit cour et courtisans dit forcément roi. Et le roi, ici comme ailleurs, n'est visible que par le petit nombre qu'il veut bien voir, lui ! Et le roi ne discute pas avec les gens, des militants ! Il commande, ordonne, veut qu'on trouve des solutions, mais n'entend pas se voir poser des problèmes. Les problèmes, c'est pour les autres et les solutions pour lui. Comment, avec ça, s'étonner que le président national ait dénoncé sans détour le conservatisme et l'immobilisme qui se sont emparés de sa formation politique ?

Quand on quitte le parti au pouvoir pour jeter un coup d'œil sur ce qui se passe au sein des nouveaux partis créés depuis 1991, on n'est pas loin de constater la même volonté d'autocratisme de la part de leurs dirigeants. Ce n'est un secret pour personne, les militants de diverses formations politiques nouvelles se sont plaints des méthodes dictatoriales de leurs leaders. Au Social democratic front ( Sdf), au Mouvement pour la démocratie et le progrès (Mdp), à l'Union démocratique du Cameroun ( Udc), il y a eu la même grogne de ceux qui estimaient que l'autocratisme de leur chef atteignait à un moment donné le seuil de l'intolérable. Soit ils ont changé de camp par eux-mêmes, soit ils ont été purement et simplement exclus du parti. Personne ne l'avouera facilement, et pourtant, le comportement de divers chefs de partis veut tellement imiter l'Ahidjoïsme qu'il faut n'avoir pas vécu l'ère du premier président du Cameroun indépendant pour ne pas s'en apercevoir ! La grande leçon que tout apprenti chef de parti semble avoir retenue de la période de l'Union camerounaise (Uc) et de l'Union nationale camerounaise (Unc) est celle de l'autocratisme. Surtout de la part de ceux qui ont été des collaborateurs de l'ancien président. Si, aujourd'hui, bien des Camerounais se plaisent à parler d'une certaine réussite du président Ahidjo, ils attribuent ce résultat à la méthode forte de l'homme, entre autres facteurs. Dès lors, comment s'étonner que des émules sortent de l'ombre et que ces anciens collaborateurs et même bien d'autres qui n'ont pas spécialement travaillé à ses côtés et qui sont aujourd'hui des chefs de partis, cherchent à utiliser une méthode et un style qui ont fait la preuve de leur efficacité, à savoir le pouvoir personnel et le culte de la personnalité.


Député de la Nation
Presses de l'Université Catholique d'Afrique Centrale
Yaoundé, Janvier 2002 p. 137- 139

 

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